Qu’est-ce qu’une infection nosocomiale ?

Il s’agit d’une infection contractée dans un établissement de santé public ou privé, au cours ou à la suite d’une hospitalisation, et qui n’était pas présente ou en incubation lors de l’admission du patient dans cet établissement, qu’elle soit endogène ou exogène (CE 10 oct. 2011, Centre hospitalier d’Angers, n° 328500).

L’infection est considérée comme nosocomiale lorsqu’elle apparait dans les 48 heures suivant l’hospitalisation. Ce délai peut varier selon le type d’infection et les pratiques médicales.

Une enquête nationale de prévalence des infections nosocomiales et des traitements anti infectieux en établissement de santé a été menée en 2022. Les résultats de cette enquête révèlent un taux de patients infectés de 5,71%. Cela signifie qu’un patient hospitalisé sur dix-huit présente une infection nosocomiale. C’est la raison pour laquelle la loi a prévu un régime d’indemnisation spécifique.

Le cadre juridique des infections nosocomiales

  • La Loi Kouchner de 2002

En matière d’accidents médicaux, c’est la Loi Kouchner du 4 mars 2002 (Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé) qui a mis en place un système de solidarité nationale, destiné à faciliter l’indemnisation des dommages résultant d’un accident médical, d’une infection iatrogène ou d’une infection nosocomiale.

La loi Kouchner prévoit que « les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère » (article L 1142-1 alinéa 2 du Code de la santé publique).

  • L’intervention de l’ONIAM

L’article L. 1141-22 du Code de la santé publique confie à l’ONIAM (Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux) qui est un établissement public administratif, le soin de procéder à l’indemnisation des victimes des infections nosocomiales au titre de la solidarité nationale.

La preuve d’une infection nosocomiale

Il convient de distinguer les infections nosocomiales survenues dans un établissement de santé, et celles causées par un médecin ou en cabinet médical.

  • Présomption de responsabilité des établissements de santé :
    Les établissements, services et organismes dans lesquels des actes médicaux sont réalisés engagent leur responsabilité en cas de dommage résultant d’une infection nosocomiale, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère. En France, la responsabilité des établissements de santé pour les infections nosocomiales est une responsabilité sans faute.Il existe donc une présomption de responsabilité des établissements de santé en matière d’infection nosocomiale. Ainsi, si la preuve d’une infection nosocomiale est rapportée, la responsabilité de l’établissement de santé est engagée et ce dernier ne peut pas s’exonérer de sa responsabilité même s’il prouve qu’il n’a pas commis de faute.Cependant, l’établissement peut s’exonérer de sa responsabilité en prouvant que l’infection est due à une cause étrangère, c’est-à-dire un événement irrésistible, imprévisible et extérieur à l’établissement.
  • La nécessité d’une faute démontrée à l’encontre des professionnels libéraux :
    En ce qui concerne les professionnels de santé exerçant à titre libéral, le patient devra rapporter la preuve d’une faute. C’est une différence majeure avec la responsabilité des établissements de santé. Cette distinction a été validée par le Conseil Constitutionnel dans une décision du 1er avril 2016 (Cons. Constit., 1er avril 2016, n° 2016-531).

Comment obtenir une indemnisation pour une victime d’infection nosocomiale ?

  • Conditions d’indemnisation :

L’article L. 1142-1-1, 1°, du code de la santé publique, instauré par la loi n° 2022-1577 du 30 décembre 2002 relative à la responsabilité médicale, dispose qu’ouvrent droit à réparation par l’ONIAM au titre de la solidarité nationale les dommages résultant d’infections nosocomiales survenus après 2001 et correspondant :

– à un taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieur à 25 %,
– les décès provoqués par ces infections.

Ainsi, lorsqu’une infection nosocomiale entraîne un dommage remplissant les conditions requises, l’ONIAM indemnise en lieu et place de l’établissement de santé dans lequel l’infection a été contractée.

Il s’agit d’un mode de règlement amiable, rapide et gratuit, des accidents médicaux, des infections nosocomiales et des affections iatrogènes.

Afin de pouvoir bénéficier de cette procédure de règlement amiable, plusieurs conditions prévues par l’article L. 1142-1 II du Code de la santé publique issu de la loi du 4 mars 2002 sont nécessaires :

  1. D’abord, il faut que l’accident médical en cause soit imputable à un acte de prévention, de diagnostic ou de soins.
  2. L’accident médical doit avoir ensuite un caractère d’anormalité au regard de l’état de santé du patient, comme de l’évolution prévisible de celui-ci.
  3. Enfin, le patient doit présenter au moins un des trois critères principaux de gravité qui sont :
    • L’incapacité permanente : elle doit être supérieure à 24% ;
    • L’arrêt temporaire des activités professionnelles : il doit être d’au moins 6 mois consécutifs, ou non consécutifs au cours d’une même année ;
    • Le déficit fonctionnel temporaire introduit par la loi du 12 mai 2009 (décret d’application de mars 2011) : il s’agit de l’inaptitude à exercer des activités que l’on fait au quotidien, il doit être de 50% pendant 6 mois consécutifs ou non consécutifs au cours d’une même année. Exceptionnellement, lorsqu’aucun de ces trois critères n’est satisfait, la victime peut bénéficier du règlement amiable si elle remplit un des deux critères suivants :
    • L’inaptitude professionnelle
    • Les troubles particulièrement graves dans les conditions d’existence

Quelle procédure suivre ?

Pour les infections remplissant les conditions requises, la procédure se déroule auprès de l’ONIAM (Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux).

Il convient de compléter un formulaire et joindre les justificatifs tels que le dossier médical, les arrêts de travail, etc. L’ensemble du dossier peut être téléchargé sur le site de l’ONIAM : https://www.oniam.fr/questions-frequentes/je-veux-saisir-l-oniam-quelles-sont-les-pieces-necessaires-pour-que-mon-dossier-soit-considere-comme-complet-par-l-oniam-

Pour les infections les moins graves, l’ONIAM n’intervient pas.

Toutefois, la victime peut également saisir :

  • L’assureur de l’établissement
  • Ou la Commission de conciliation et d’indemnisation (CCI), dans le cadre d’une conciliation ou dans un cadre amiable.

Pour saisir la CCI, les victimes doivent remplir un formulaire d’indemnisation, accompagné d’une fiche pratique spécifique. Le dossier est disponible sur le site Service public : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F13318

Après examen, la Commission peut :
• s’il ne remplit pas les conditions d’accès à la Commission : rejeter le dossier ;
• s’il existe un doute sur les conditions d’accès à la Commission : transmettre le dossier à un expert qui, après examen des pièces, se prononcera sur la recevabilité;
• s’il remplit les conditions d’accès à la Commission : transmettre le dossier à un expert qui examinera la victime, évaluera ses préjudices et déterminera l’origine des dommages.

Cette expertise médicale est gratuite et contradictoire.

Les procédures devant la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (CCI) ou l’ONIAM sont encadrées dans des délais stricts afin d’accélérer l’indemnisation des victimes.

En pratique, la victime devra tout de même attendre plusieurs mois pour être indemnisée, voire plusieurs années si son état n’est pas consolidé.

À tout moment, y compris lorsque la procédure de règlement amiable est engagée, la victime peut engager parallèlement une autre action auprès des tribunaux ou saisir directement le Tribunal en référé pour obtenir du juge la désignation d’un médecin expert chargé d’établir les responsabilités et les préjudices médicaux.

Les tribunaux compétents sont :

  • Le tribunal judiciaire pour les établissements privés (cliniques).
  • Le tribunal administratif pour les établissements publics (hôpitaux).

Le montant de l’indemnisation des préjudices en lien avec une infection nosocomiale dépend de plusieurs critères et notamment des postes de préjudices retenus dans le rapport d’expertise.

L’indemnisation des conséquences nosocomiales se fera sur les bases :
– soit du barème de l’ONIAM si l’infection a été causée par un établissement de santé public
– soit sur la base du barème des Cours d’Appel (Référentiel MORNET) si l’infection a été causée par un établissement de santé privé ou par un praticien libéral.

Que ce soit devant la CCI ou devant les Tribunaux, si l’état de santé du demandeur n’est pas consolidé, la procédure sera suspendue dans l’attente de la consolidation, c’est-à-dire une stabilisation de l’état de la victime.

Si la victime dispose d’une assurance de « protection juridique » elle pourra bénéficier d’un accompagnement sur le plan amiable et de la prise en charge des frais d’experts, médecins-conseils et avocats selon les conditions du contrat.

 

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