Chaque année, des dizaines de personnes se déclarent victimes d’erreurs médicales.
Bien qu’il soit difficile de déterminer avec précisions des chiffres, les incidents ont augmenté considérablement ces dernières années[1].
Une erreur ou un accident médical peut se définir comme un incident évitable commis par un professionnel de santé.
Les erreurs médicales les plus fréquentes sont :
- l’erreur de diagnostic,
- l’erreur chirurgicale,
- l’affection iatrogène (L’affection iatrogène est l’affection résultant d’un médicament ou d’un traitement inadapté),
- les infections contractées durant les soins (ex : une infection nosocomiale ; c’est une infection contractée 48 h après le début du séjour dans un établissement de soins)
Une erreur médicale n’engage pas forcément la responsabilité des professionnels de santé.
La loi définit les personnes ayant qualité pour agir, conditionne le recours à l’existence d’une faute, et prévoit un délai d’action.
En effet, ont la qualité pour agir en cas d’erreur médicale :
- La victime ou ses ayants droit si cette dernière est décédée ;
- Le tuteur ou le curateur si la victime est un majeur protégé ;
- Le représentant légal si la personne ayant subi le dommage est un mineur.
Par ailleurs, pour engager la responsabilité contractuelle du professionnel de santé, il est nécessaire de prouver :
- L’existence d’un dommage certain et direct ;
- La faute du praticien ;
- Le lien de causalité entre l’acte médical et le préjudice.
Ainsi, pour obtenir une indemnisation en cas d’erreur médicale, il est nécessaire de réunir toutes les pièces permettant d’établir l’existence des préjudices subis et la faute du praticien (notamment : copie de l’intégralité du dossier médical en lien avec l’intervention litigieuse, ainsi que d’autres comptes rendus médicaux émanant de nouveaux praticiens/établissements consultés consécutivement…).
[1] Le nombre de déclarations reçues à la HAS a augmenté de 27 % entre 2021 et 2022 (publication de la Haute autorité de santé – https://www.has-sante.fr/jcms/p_3472509/fr/evenements-indesirables-graves-associes-aux-soins-eigs-bilan-annuel-2022)
Enfin, il faut préciser que le délai de prescription de l’action en responsabilité est dans ce cas de 10 ans à partir de la consolidation du dommage.
Comment procéder pour faire reconnaître une erreur médicale ?
Le premier réflexe à avoir, dans une telle situation, est d’avoir la certitude qu’il s’agit bien d’une « erreur médicale » ainsi que sa nature.
Pour cela, il est nécessaire de faire intervenir un médecin expert spécialisé qui va déterminer l’existence ou non de la faute du praticien et ce, dans le but d’avoir une idée suffisamment précise de l’accident en question ainsi que des possibilités de recours.
En droit français, plusieurs voies de recours sont possibles pour les victimes d’erreurs médicales, en fonction de la nature de l’erreur et du type d’établissement de santé concerné.
Infection nosocomiale, accident médical ou affection iatrogène
1/ Le recours amiable
Pour obtenir une indemnisation amiable, il est possible pour la victime soit de saisir la CCI (commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux) qui est compétente pour les dommages présentant une certaine gravité, soit de prendre attache auprès de l’assurance Responsabilité civile professionnelle du praticien litigieux.
A/ La CCI
La compétence de cette commission est soumise à divers critères dont :
- une Incapacité Permanente Partielle supérieure à 24%,
- des troubles particulièrement graves dans les conditions d’existence,
- une incapacité de travail d’au moins 6 mois sur une période de 12 mois
- un Déficit Fonctionnel Temporaire (DFT) d’au moins 50% pendant au moins 6 mois sur une période de 12 mois,
- ou une incapacité à reprendre l’activité professionnelle exercée avant l’accident médical.
Si la victime remplit l’une des conditions, elle doit compléter le formulaire CERFA de demande d’indemnisation n°12245 en y joignant l’ensemble des pièces justificatives du préjudice, sa nature, sa gravité et le lien avec l’acte médical et l’adresser au Pôle compétent chargé d’instruire les dossiers de sa région.
Cette commission a pour objet d’évaluer, après instruction du dossier, s’il s’agit réellement d’un accident médical ou d’un aléa thérapeutique et de déterminer la faute du praticien.
A titre de précision, l’aléa thérapeutique est un accident médical dû à la part de hasard et de risques qui existent lorsqu’un soin est prodigué. Il demeure le risque imprévisible et non maîtrisable. Il s’agit d’un motif d’exonération de la responsabilité du médecin ou de l’établissement.
Dans l’éventualité où la commission se déclarerait compétente, la victime sera convoquée à une expertise médicale.
Par la suite, la Commission émettra un avis qu’elle transmettra à l’assureur de la partie adverse ou bien à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), selon que la faute du praticien sera ou non retenue, qui adressera alors à la victime une offre d’indemnisation.
-> Si l’assurance refuse de le faire, en cas de silence de sa part dans les 4 mois qui suivent la réception de l’avis, ou si le professionnel de santé n’est pas assuré, l’ONIAM versera l’indemnisation déterminée.
Si la victime ne recueille pas l’une des conditions pour saisir la CCI, elle peut obtenir réparation directement auprès de l’assurance du praticien.
B/ L’assurance responsabilité civile professionnelle du praticien
Dans un premier temps, il lui appartient de contacter l’établissement dans lequel les soins litigieux se sont déroulés pour l’interroger sur le statut d’exercice du chirurgien au moment des faits.
En effet, on distingue 2 situations :
- si le praticien exerce à titre salarié : c’est l’assurance responsabilité civile professionnelle de l’établissement qui aura vocation à s’appliquer.
- si le praticien exerce à titre libéral : c’est son assurance directement qui devra être saisie.
Lorsque l’assurance adverse aura été saisie, il conviendra d’adresser l’intégralité des pièces médicales afin de statuer sur le recours.
Une expertise amiable et contradictoire pourra être organisée au cours de laquelle un expert évaluera et chiffrera l’ensemble des préjudices de la victime.
A réception du rapport d’expertise, l’assurance adverse adressera une proposition d’indemnisation définitive ou provisoire selon que son état de santé sera ou non consolidé.
Parfois, lorsque la phase amiable échoue, soit en raison d’une incompétence de la CCI, ou d’un refus d’indemnisation de l’assurance adverse, et lorsqu’un avis d’expert lui est favorable, il peut s’avérer indispensable pour la victime d’intenter un recours judiciaire.
2/ Le recours judiciaire
La juridiction compétente dépend du type d’établissement de santé concerné par les soins litigieux.
En effet, si l’erreur médicale a eu lieu dans un établissement public (hôpital public, centre hospitalier universitaire, etc.), la victime peut saisir le Tribunal administratif (TA). Elle doit généralement former une demande d’indemnisation avant de saisir le juge.
Dans ce cas, il arrive parfois que l’établissement oppose à la victime une « fin de non-recevoir » par courrier recommandé. Cette décision fait alors courir un délai de deux mois pour saisir soit le TA, soit la CCI. A défaut de recours dans ce délai, la victime ne sera plus recevable à intenter une quelconque action dans le cadre de son affaire.
A contrario, si l’erreur médicale a eu lieu dans un établissement privé (clinique, centre de lutte contre le cancer, etc.), elle peut saisir le Tribunal judiciaire. Si la demande d’indemnisation est supérieure à 10 000 euros, la représentation par un avocat est obligatoire.
Dans les deux cas, il est nécessaire de confier son dossier à un avocat spécialisé en droit de la santé/droit du dommage corporel.
Dommage lié à la vaccination
La procédure d’indemnisation diffère suivant le cas :
- Le vaccin est obligatoire : la demande de dédommagement doit être déposée au secrétariat de l’ONIAM ou envoyée directement à cet organisme par lettre recommandée avec avis de réception ;
- Lorsque la responsabilité du professionnel de santé ne peut pas être mise en cause, les préjudices subis par le patient peuvent être pris en charge par l’ONIAM si le dommage dépasse le seuil de gravité évoqué supra.
- La vaccination est recommandée : il faut saisir la CCI.
Contamination à la suite d’une transfusion
Une personne contaminée par l’hépatite B ou C, le virus T-lymphotropique humain ou le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) consécutivement à une transfusion sanguine peut être indemnisée.
Pour ce faire, elle doit se rendre au siège national de l’ONIAM ou à la CCI avec les documents justificatifs du dommage. L’ONIAM a 6 mois pour rendre sa décision.
Dans l’ensemble de ces cas, disposer d’une couverture assurantielle est nécessaire.
- L’importance d’être assuré :
Si la victime dispose d’une « Garantie Accidents de la Vie » souscrite auprès d’un assureur, il lui sera possible, selon les conditions générales et particulières du contrat, de la déclencher sans même attendre que la justice statue sur la question du droit à indemnisation et de la faute du tiers.
Cette garantie couvre généralement les accidents médicaux, y compris les aléas thérapeutiques.
Si la victime dispose d’une assurance de « protection juridique » la victime pourra bénéficier d’un accompagnement sur le plan amiable (pour faciliter les échanges avec l’assurance du tiers, missionner un expert, prendre en charge ses honoraires, calculer l’indemnisation possible, négocier l’indemnisation…) mais également judiciaire avec la prise en charge des frais d’experts, médecin-conseil, avocat selon les conditions du contrat. Cette aide peut s’avérer précieuse pour percevoir une juste indemnisation.